Res’eau

Projet nominé au concours Jacques Rougerie : https://jacquesrougeriedatabase.com/Projects/project/596/642

Bienvenue à Cotonou, capitale économique du Bénin ou prend place notre projet. Cette ville bénéficie d’une situation très particulière. Ville portuaire, ouverte sur l’océan, il s’agit de la porte d’entrée des exportations et importations du pays. Elle est également tournée vers le lac Nokoué, fort de 4900 ha, véritable réserve de biodiversité et classifié Ramsar.

Cette ville entre deux eaux est en proie à différentes problématiques affectant aussi bien les flancs maritimes et lacustres, entraînant une compression de son cordon littoral. En effet, depuis 1961 et la construction de grandes infrastructures portuaires au Bénin et au Togo, ainsi que la mise en place de certains barrages, le phénomène d’érosion du littoral s’est intensifié provoquant un recul des côtes de plus de 400m en 40 ans, obligeant les habitants à quitter leur maison construites le long de l’océan.

Parallèlement, Cotonou se situe à la pointe du grand bassin versant de l’Ouémé, fleuve principal du pays se jetant dans le lac Nokoué. Les crues régulières provoquées par la saison des pluies entraînent des inondations catastrophiques sur les berges du lac. Ces phénomènes récurrents ne sont pas ignorés de la population mais la pression démographique importante de la ville oblige les habitants à fabriquer des constructions précaires au sein de ces zones interdites.

L’eau joue donc un rôle majeur dans l’organisation de cette ville littéralement prise en étau entre ses deux rives, tantôt douce et salée. Paradoxalement, ses infrastructures d’assainissement sont sous-dimensionnées et les problèmes liés à l’eau potable et à la gestion des eaux-usées sont prépondérants dans certains quartiers de la ville, causant de nombreux problèmes de santé publique et ayant un lourd impact sur le développement de Cotonou.

C’est dans ce contexte particulier que naît ce projet d’une nouvelle urbanisation de la côte du lac Nokoué. S’appuyant sur ces problématiques de l’eau, il se comporte comme un réseau d’assainissement autant qu’un système architectural proposant une nouvelle urbanité sur les berges du lac.

Il se compose d’un collecteur d’eau sur pilotis, recueillant les eaux pluviales grâce à une série de toiles hydrofuges, courbées de manière à guider l’eau de l’une à l’autre, jusqu’au cœur de l’édifice et de son château d’eau. Cette structure assure la gestion de l’eau en la mettant à disposition des habitants à travers des équipements sanitaires collectifs à l’échelle du quartier. Il agit en symbiose avec un ensemble de maisons et de passerelles flottantes connectées en réseau et recueillant également l’eau de pluie à travers leurs toiles. Ce complexe permet de drainer et de stocker une grande quantité d’eau et de la renvoyer purifiée ou chauffée à ces maisons flottantes via le système de passerelle.

Celles-ci sont constituées de deux flotteurs en caoutchouc soutenant des modules de bois, biseautés et joins entre eux par des connecteurs métalliques permettant une légère rotation. La passerelle devient alors un élément mouvant au gré de l’eau, dont sa flexibilité assure sa solidité, tout en gardant une forme globalement équivalente grâce à la forme en treillis de l’ensemble du réseau. Elles proposent donc une déambulation à travers les structures en pilotis des anciennes habitations, maintenant inondées et détruites par les éléments, mais dont l’accumulation de sédiments les a rendus propice au développement de plantes aquatiques. Elles viennent ainsi créer des îlots de nature qui rythment les bords du lac et participent à un nouvel écosystème naturel.

Les maisons flottantes se déclinent en trois grandes typologies liées à leurs voilures. A double courbure, à deux ou à quatre pentes, elles impliquent une conception différenciée du bâti selon leurs formes et leurs tailles. Ces habitations de chaume, de bois et de terre crue sont inspirées de modèles de cases traditionnelles béninoises. Elles sont conçues comme une grande pièce unique, divisible par la suite en quatre pièces égales. Elles n’ont pas de fenêtres, mais de larges ouvertures gérées par des panneaux coulissant, leurs permettant la nuit de profiter d’une température régulée par l’isolation naturel des matériaux et par les panneaux isolants, et le jour d’ouvrir le toit de la maison, tout en ayant la possibilité de réguler l’entrée de lumière suivant le positionnement de la toile pare-pluie et en conservant l’intimité grâce au seuil formé entre les maisons et les terrasses.

Ces constructions et plus largement ce projet a pour vocation de s’inscrire dans le contexte économique, social et climatique du bénin. Il se présente comme un système constructif et spatial voué à évoluer au fil du temps plus que comme une forme figée.